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La confiserie européenne au Moyen Age

La con serie europeenne au Moyen Age
LILIANE PLOUVIER
1. ÜRIGINES
La Con serie est nee du besoin de garder les fruits. L’agronome romain du ler s. de notre ere Columelle decrit diverses techniques dc conservation restecs cn vigueur jusqu’au 20e s.: Ia dessication, l’emmagasinage dans une matiere inerte (sciure de bois, paille, sable, etc.), l’enrobage avec une substance a caractere antiseptique, appelee conditio (du verbe condire = conservcr).1 Ce type dc con­ serve porte Je nom de conditu�; avec lui nous sommes au seuil de Ia confiserie. Comme aujourd’hui, !es conditione� comprennent des bains aussi bien sales ou acides que sucres. Ne connaissant pas le sucre,2 les Anciens proposent plusiers alternatives: le pa�sum, vin de raisins secs, notre vin de paille; Ia 3apa ou le defrutum, c. a d. le jus de raisin cuit et reduit jusqu’a diminution des 2/3 ou de 1/2; et en n le miel, roi des conditiones. Ses proprietes conservatrices sont reconnues depuis longtemps.3 La me eeine lui attribue en outre des ver­ tus therapeutiques. Dioscoride, contemporain de Columelle, l’indique dans les a ections de Ia gorge,4 indication qu’il possede encore a ce jour.
Le fruit favori est par ailleurs le coing egalement doue de vertus medicin­ ales. Deja Hippocrate (Se s. avant notre ere) le prescrit en cas de diarrhce.5 Pas etonnant des lors que !es coings condits au miel aient d’entree dc jeu ete accapares par Ia medecine. C’est ainsi que Ia Con serie entre dans l’o cine et devient une branche de l’art de guerir, qu’elle restera jusqu’a Ia Renaissance.
Galien (2e s. de notre ere) signale par exemple une A0 ACUWVV (de AOV = coing et A WVVT = tabJette), pate de coing, a administrer a ceux
1 „Dere rustica“ in Le1 agronome romain•, ed. et tr. fr. M. Nisard, Puris, 1844, no�antmen� pp. 460 et a. et 479 et s.
2Le ‚“‚ apov, 1accharumqu’onrencontrednnslnIitternlurean�ique(cf.Dioscoride,Pline) est }e tnbaacrur, COncretion si(iceuse qui SC lrOUVe dnns }’enlre-noeuds dc ccrtnins bnmbous indiena(cf. J. Andre, L’alimentation d Ia cuüine d Rome, Pnris, 1981, p. 186: contra S. W. Minh:, Sweelneu and Power, New York, 1986, p . 20).
3 Le cadnvre d’Alexandre Je Grand y fut, dit-on, conserve. 4 Le� i Iivre. de Ia matitre midicale, Lyon, 1559, p. 160.
5 „Des mnladies“ in Oeuvre• complite. d ‚ll•ppocrate, Livre Ill, ed. et t1·. fr. E. LiLlrc, Pnris, 1839-1861, p. 161.
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qui souffrent de l’estomac. D’apres lui, elle serait une invention espagnole.G La Peninsule iberique continuera du reste a jouer un role important dans Je developpement de Ia con serie au Moyen Age (cf. infra, p. 37). L’eminent specialiste cite en outre un medicament au jus de coing (ro fna rwv v6wv�wv WV TOV xv ov p a OV) classe parmi Jes stomachiques (indiques dans les affections de l’estomac) et de sa propre invention. Il est fait avec 2 parts de jus de coing, 2 parts de miel et 1 part de vinaigre. On peut y ajouter du gingembre et du poivre. Le tout est cuit jusqu’a �r axo�, consistance du miel.1 En executant la recette, j’obtins une belle gelee rouge et translucide. Les traites medicaux greco-romains mentionnent par ailleurs un medicament aux fruits antidiarrheique et stomachique (ro 6u� rwv 0 w v app.a ov en grec, medicamentum ex pomis en latin). Des fruits divers (pommes, poires, grenades et surtout coings) sont cuits dans du miel (parfois de la sapa ou du mo t) „donec omnia quae indita sunt liquata in unitatem quandam coeant“, „jusqu’a ce que tous les ingredients aient ete reduits en compote et forment une masse uniforme“I ecrit Celse (Ier s. de notre ere).8 Columelle stipule pour sa part que le remede en cause doit etre cuit „donec crassamen in modum fecis existat“, „jusqu’a Ia consistance de Ia matiere fecale“.9 C’est bien l’allure que possede cette sorte de confiture apres preparation! Le go t n’est cependant pas desagreable, comme Je constate Celse („id gustu non insuave est“).10
Deux autres fruits sont egalement combines a du miel, sans pour autant concurrencer les coings: les grenades et les m res. On en fait surtout des storn­ atices (indiques dans les affections de Ia bouche). Parmi eux le medicament aux grenades (ro 6w TWV pmwv pp.a ov) cree par Criton, medecin grec ayant vecu au ler s. de notre ere.11 Il est administre de plusiers manieres: soit comme boisson, soit comme gargarisme, soit comme collutoire (qui est applique sur Ies gencives).12 Le medicament aux m res (ro o�a TWV o v p a ov), fameux remede cree par Heras, contemporain et compatriote de Criton, est administre et prepare de Ia eme fa on.13 Ces stomatices ont tous deux une consistance
G „De alimentorum facultatibus“ in Opera omnia, ed. et tr. lat. C. G. Kuhn, Leipzig, 1821-1833, p. 603.
1 Id., p. 603 et cf. aussi „De sanitatis tunnda“ in Oper omni cit., p. 450.
6 De medicin , ed. et tr. angl. W.G. Spencer, Londres, Cambridge, 1935-1938, Livre IV, p. 442.
9 „De re rustica“ cit., p. 477. 10 De medicina cit., p. 442.
11 CiteparGalienin „De compositionemedicament umsecundumlocos“, in op.cit., T XII, p. 933.
12 ,lotrtl� est un autre mellite de grenade mentionne dans Ia Iitterature greco-latine.
13 Cite par Galien „De compositione …“ cit., p. 929.
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visqueuse comparable a celle du sirop. Dans Ia pharmacopee moderne on les appelle mellites car a base de miel et non de sucre.
On tente en n d’unir le miel aux fruits secs et d’en faire des p tes, ancetres du nougat et du massepain. Galien mentionne notamment un medicament a leeher antitussif (! ��LKTOII ß XLKO 14) a base d’amandes ct de pignons entiers,15 tandisque Hippocrate deerit un iK�CLKTov composc d’amandes pilees recommande en cas de pleuresie.16
1 1 . LE HAUT MOYEN AGE
Des l’automne de l’antiquite s’amoree pour Ia me eeine eomme pour les scienees en general une longue periode de stagnation qui se manifeste aussi bien dans l’Ouest que dans l’Est de !’Empire romain.
En Orient malgre Ia releve byzantine peu d’innovations sont introduites.
Les anciennes recettes sont reproduites notamment par Oribase (4e s.),17 Ae­ tios (6e s.),18 Alexandre de Tralles (6e s.)19 et Paul d’Egine (7e s.),20 dernier representant de Ia me eeine greeque. On y retrouve, generalement SOUS un nom abrege, Ia gelee de eoing (6LO �wv), Ia eon ture de fruits (6w o v), les mellites de m res (bLO LO v) et de grenades (6tapotwv). La pate de coing reste en revanehe L A0 �aKovvra, tandisque les remedes aux fruits secs s’appellent aussi bien !KACLKTO qu’t ��L LO ou iK�W’f OTLOII (forme diminutive). Sig­ naions que Paul d’Egine cite parmi ses „potions o cinales et delicieuses“ le LT , autre mellite de grenades.21
En Occident, en revanehe, se dessine l’inexorable mouvement de declin, qui se precipite au Se s. avec l’avenement des royaumes „barbares“. La pensee grecque survit a travers des copies deformees, qui sont transposees dans un
14 i�<A 11 a pour base divers vegetaux: legumes, epices, eurs et surtout fruits. Comme aujourd’hui, ceux-ci sont places dans des bains mielles ou sucres et y subissent des cuissons successives ayant pour but de faire disparaltre progressivement leur eau de constitution. Le prince de Ia medecine Avicenne cn donne une description detaillee dans son grabadin, dont le Traite 7 est intitule De conditü. Prunes, pommes, citrons et coings, dont l’hegemonie persiste, sont utilises. Pour faire des Cydonia condita, coings con ts, on coupe !es fruits en morceaux, on les epepine et les pele. On les couvre d’l part de miel et d’l/2 part d’eau. On donne deux ou trois bouillons, puis on egoutte les coings. Ensuite on les recouvre d’l/2 part de miel et d’l/2 part d’eau. On donne encore deux ou trois bouillons et on egoutte a nouveau. Les coings sont alors mis a secher sur un Iinge. Lorsqu’ils ont rendu leur humidite, on les recouvre entierement de miel et les recuit une derniere fois.
Le citrum conditum d’Avicenne emploie a la fois du miel et du sucre. Seuls !es zestes sonl con ts. Apres avoir subi un traitement prealable ayant pour objet d’enlever leur amertume, on les cuit dans de l’eau et du sucre (d’une quantite egale a 1/3 du poids des zestes). Apres quoi on egoutte ceux-ci et les met secher pendant 2 jours sur une table. On !es recuit avec de l’eau du sucre (Ia moitie du poids des zestes cette fois), on !es egoutte et laisse secher 3 jours. Puis on recommence l’operation en rempla ant le sucre par du miel. La derniere cuisson doit durer 5 a 6 h.
Les fruits secs (noix, amandes) sont soumis a un traitement comparable; de meme Je gingembre, qui Se presente SOUS forme de tab)ettes:
„prendre des gingembres de Chine, les couper en gros morceaux, !es faire macerer dans l’eau pendant 20 jours; les secher, les mettre dans un pot en
67 Op. cit., p. 12.
GS Op. cit., p. 68.
G Cf. La nouvdle O cine de Dorvault, Paris, 1955, p. 434.
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pierre avec assez d’eau et de miel pour recouvrir: faire bouillir longtemps, !es retirer de l’eau et du miel, !es couper en petits morceaux, leur ajouter du miel ecumc!“ (recette de Mahmoud).70
Les murabbayat de eurs se font autrement. Voici le geleniabin as-soukkary (sucre rosat) egalement extrait de M hmoud:
„prendre des roses … mondees … sechees …
„ajouter pour chaque mann de sucre 1 rnann de roses …
„broyer fortement avec le sucre jusqu’a faire disparaitre Ia rose
„exposer au soleil en recouvrant avec un tamis, melanger chaque jour, matin et soir; si on voit que le sucre se desseche, faire dissondre un peu de sucre dans l’eau et Je verser dans le vase puis remuer; faire de meme pendant 30 a 40 jours;
enfermer.“ 7 1
„Marmelada“ et „Marmalade“
Les Arabes poussent par ailleurs plus loin !es differentes possibilites offertes par Ia fermentation pectique. Bien qu’identifiee seulement en 1831 par Braconnot, Ia pectine est exploitee depuis longtemps (cf. supra, p. 29). Cette substance liquide se trouve en plus ou moins grande quantite dans Je jus des fruits. Elle est toujours accompagnee d’un ferment, Ia pectase, capable de Ia transfor er en acide pectique et d’entrainer une coagulation du jus. Cette fermentation dite pectique servir a deux fins: d’une part a obtenir un corps soluble. Dans cette hypothese on exprime Je jus du fruit, on le laissc clari er par Je repos. La fermentation pectique se met spontanement en route: mais au lieu de coaguler l’ensemble, elle n’entraine a Ia surface qu’un magma gelatineux, ramassant en cours de formation toutes !es impuretes du jus, en-dessous duquel se trouve en n de course un liquide parfaitement limpide. II sert de base a Ia fabrication de 2 specialites arabes:
1) le rubb (Iitteralement suc), en latin et fran ais rob. II s’agit du jus des fruits acides (groseilles, raisins verts, citrons, coings) qui apres clari cation est ltre, cuit et reduit.
2) le sharab al-fawaki, syrupus de fructibus, sirop de fruits. Le jus prealablement clari e est melange avec du sucre et cuit. Les fruits les plus employes sont !es grenades. Le syrupus de grenatis re porte un tel succes, qu’il evince completement son ai’eul au miel, Je diaroion. Le diamoron n’est en revanche pas elimine par Je sirop de m res.72
D’autre part Ia fermentation pectique permet d’obtenir un corps insoluble.
Dans cette hypothese !es fruits non debarrasses de leurs matieres pectiqucs
70 Op. cit., p. 56
71 Op. cit., p. 53.
72 Encore mentionne dan5 La nouvdle O teine de Dorvault cit. p. 925.
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sont soumis a l’action de Ia chaleur qui en stimulant l’hydrolyse de Ia pectine provoque une prise en masse integrale. Selon qu’on utilise Ia chair ou le jus on peut obtenir une con ture, une pate de fruit ou une gelee. Les Arabes ne se bornent pas a reprendre !es stomachiques grecs (diamelon, diaoporon, meloplacontium sont ranges parmi !es gawari.mat signi ant en effet digestifs, en latin electuaria – qui restent deles a leur vocation con turiere tardive); ils innovent aussi. C’est ainsi que !es zestes d’agrumes sont utilises. Avicenne decrit un electuarium de citro, ancetre de Ia mannelade anglaise (marmalade); des zestes de citron sont cuits avec du miel et diverses epices (giro e, muscade, poivre long, poivre noir, cannelle, gingembre, galanga, musc).
Remarquons que !es electuaria aux fruits d’Avicenne sont faits au miel. Le Sucre s’y substituera plus tard, entre !es 12e et 13e s. Le receptaire andalous du 13e s. cite plus haut commence par donner la recette classique de la pate de coing au miel (pa“ta de membrillo, invention espagnole comme on sait, cf. Upra, p. 29) et propose ensuite „un otra receta, que e“ ma“ nueva“, une autre recette qui est plus recente, avec du sucre. En portugais cette pate s’appelle marmelada (cf. marmelo = coing).73
Massepaints et nougats
Quant aux ecligmatia aux fruits secs, ils sont repris tels quels sous le nom de la ‚uq (du verbe la’aqa = lecher), qui donne en fran ais comme en latin looch.
A leurs cötes apparaissent d’autres friandises du meme type, qui ne sont cependant plus faites par le pharmacien, mais le cuisinier. Pour Ia prerniere fois Ia con serie sort de l’o cine et entre (avec fracas) dans Ia Iitterature culinaire. Celle-ci est en e et tres prolixe au sujet de ces confections qu ‚elle range parmi !es halwa (= douceurs). Al- Wu la (Bagdad – 13e s.), le seul livre de cuisine arabe accessible aux Occidentaux – il a ete traduit en anglais en 1939 par Arberry74 – en donne une foule de recettes. La pluspart d’entre elles appartiennent a Ia fa ille des massepains.
Citons en outre une interessante preparation aux pistaches appelee halwa yabüa. Du sucre obtenu selon Ia technique des electuaria dulcia est petri avec des pistaches entieres et coupe en morceaux. Un parent du nougat et des pa ta“ de pinillo ou de nuez verde du receptaire anonyme d’al-Andalus (faites au miel,
rappelons le – cf. Upra p. 38).
Comme Ia plupart des con series sont reputees aider a Ia digestion, on
prend I’habitude de !es servir a Ia n du repas. Le celebre medecin Ibn Butlan du l le s. a rme notamment dans son Iivre, Tacuinum „anitatü (traduit au 1 3e
73 Cf. A. Wilson, The Boo of Marmalade, Londres, 1985, p. 24.
74 „A Baghdad Cookery-Book“ , 1�/amic Culture, 1939, p. 21 et 189.
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s.) que les halwa font disparaltre de Ia bouche les residus gras des nourritures. C’est pour cette raison qu’on les mange en dernier lieu.75
IV. MESUE, PERE DE LA CONFISERIE EUROPEENNE
Entre !es 12e et 13e s. vit en Occident un certain Joannes Mesues Damascenus surnoemme Divuj, le Divin. II a redige une Serie d’oeuvres medicinales en latin connues sous le nom d’Opera Menae. ; Parmi elles gure un rcceptairc appele indi erement Antidotarium ou Grabadin, qui a fait autorite dans toute l’Europe jusqu’au 18e voire 1 9e s. On sait tres pen de choses sur J ‚auteur. Son nom est en e et un pseudonyme emprunte a un medecin arabe du 9e s. Yuhanna Masawaih Damasqui (777-857). A J’antiquite et au Moyen Age iJ est habituel dans les milieux scienti ques d’adopter un nom celebre pour donner une plus grande autorite a son oeuvre. C’est ainsi qu’iJ y a eu des psendo-Galien,77 des pseudo-Serapion, etc.
Pseudo-Mesue est un esprit eclaire, ayant incontestabJement re u une for­ mation medicale. II est polyglotc, car il connait au moins Je latin, l’arabe (ses sources sont Avicenne, Sara un, Haly Abbas, Rhazes, Abulcasis, qu’il a d utiliser en version originale) et le hebreu (les Opera sont tru ees de mots provenant de cette Iangue78) . I I n e semble pas etre musulman;79 peut-etre est-il juif, quoique plus probablement chretien. Pseudo-Mesue est egalement gourmand. L’Antidotarium regorge de friandises et de sucreries, contrairement a son concurrent direct l’austere Antidotarium Magnum des Salernitains (vers 1 100), dont une version abregee a ete tiree au 13e s., l’Antidotarium Nicolai8tl ayant eu Ia meme audience pharmaceutique que J’Antidotarium Me3uae.
D’aucuns81 situent Mesue en Italie, ou Jes Opera inachevees ont en ef­ fet ete terminees (par deux medecins: Petrus Aponus Oll Aponenesis Oll de Abano, 1250-1320, et Franciscus Pedemontanus tvers 1319). C’est egaJement en Italie que sont rediges les premiers commcntaires des Opera (par Je professeur
75 Ed. et tr. fr. H. El dem, These, Bruxelles, 1982. Je snisis cette occnsion pour re ercier Je professeur Elkade qui m’a beaucoup aidee dans Je depouille ent des texles nrnbcs.
76 Ed. princ., 1471. Trad. am. L. J. v ndewiele, De grabadin van P•eudo-Me••u• (X/e­ X e eeuw) en zijn invloed op de on!wikkeling van de farmacie in de Zuidelijke Nederlanden, Gnnd, 1962.
77Cf. •up note25.
78 Cf. L. Ledere, Hi•toire de Ia midecine arabe, Paris, 1876, p. 507.
79 Aueune version Drnbe n’a ete retrouvee. De plus les Opera Me.uae ne sont menlionm:s nulle part dnns Ia Iitteroture nrnbe du Moyen Age.
80 Ed. et commenlaires D. Goltz, Stuttgnrt, 1976.
81 Cf. nota ent L. J. Vandewiele, op. cit., p. 11.
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Mondino de Bologne au l3e s.). L’Espagne mauresque pourrait neanmoins aussi lui convenir. Entre les 12e et 13e s. cultures musulmanc, chretienne et juive s’y rencontrent en toute liberte, s’y ensemencent mutuellement. De plus Je califat de Cordoue est un des hauts lieux de Ia pharmacie et de Ia con serie (cj. 8 pra p. 37). Une gure hispano-mauresque typique est Jean de Seville (12e s.). Juif d’origine il se eonvertit au christianisme, traduit la bible en arabe et plusieurs livres seienti ques arabes en latin. II eorrespond bien au pro l de Mesue.
Dans I’Antidotari m Me8 ae les eon series sont reparties entre les 4 ehap­ itres suivants:
De electariü delectabilü (eh. I) De conditü (eh. IV)
De 8pecieb s loch (eh. V)
De syr pis et rob b (eh. VI).
1. De electariis delectabilis
Les electaria comprennent parmi divers rru!dieaments deleetables 4 con tures revolutionnaires pour l’epoque, puisqu’elles ne sont plus faites avee du miel mais avee du suere:
– electari m de fr ctib s (deseendant du diaporon) aux proprietes Iaxa­ tives. De Ja chair de eoing, de poires, de pommes est euite dans du vinai­ gre, ou du sumae (= petite baie rouge d’un arbrisseau eultive dans les pays mediterraneens) a macere pendant un jour et une nuit. On ajoute du verjus, des sorbes et du suere. Le tout est cuit ad mellis cra8stitudinem,
– electuarium de pomis (stomachique). 6 livres de ehair de pomme sont euites avee 2 livres d’eau de rose et 5 livres de suere,
– electuarium de persicis (stomaehique). De Ia ehair de peehe est euite avee du jus de peehe et du suere,
– electuarium de pr ni8 (stomaehique). De la ehair de prune est melangee avee du jus de pourpier, du suere et de l’eau de violette. Le tout es euit ad crassitudinem.
La „marmalade“ aux zestes de citron ( electuarium de citro – stomaehique) est en revanehe preparee au miel.
Au ehapitre des electuaria gure en outre l’antique diamelon au miel sous Je nom d’electuarium citoniis facta cum succo citoniorum aliter diacidonium. Veritable figure de proue de Ia Con serie, Mesue stipule a Ia fin de Ia reeette: „On peut aussi Ia faire au suere“. Diacidonium reeouvre non seulement Ia gelee, mais aussi Ia pate de coing. Mesue Ia fait suivant la vieille tradition ibere au miel; il propose toutefois du suere en alternative suivant la nouvelle mode andalouse.82 Ce qui pourrait eon rmer son origine espagnole.
82 Cf. �upm, p. 41.
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Les electuaria comprennent en outre des bonbons faits selon les techniques arabes a base de miel O de SliCTe et parfumes diversement: a l’anis (e[eclua7’­ ium dianüum), au giro e (aromaticum caryophyllatum), au usc (aromaticum mu catum).
En n l’electuarium regum avec amandes et pignons entiers, sucre, eau de rose, roses rouges, santal, ambre, musc, huile d’amande est inspire des halwa.
En conclusion sous le nom generique d’electuaria on trouve aussi bien nougats et bonbon, que pate de coing, „marmalade“, gelees et con tures, ces dernieres regnant en maitresses.
2. De conditü
Les conditi (heritiers des murabba) comprennent racine, eurs et fruits con ts. Toujours a l’avant-garde Mcsue prefere le miel au sucre. Cf. Citonia condita:
„Prends des beaux coings, pares-les et epepines-les; coupes-les en morceaux que tu cuis dans du juleb (sirop compose d’eau de rose et de sucre). Recuis-les Je lendemain dans un autre juleb jusqu’a ce qu’ils soient prets. Parfume-Ies au musc et conserve-les dans un bocal en verre recouverts avec le juleb dans lequel ils ont bouillis“. Pommes, poires, peches, ecorces de citron sont con ts de Ia meme fa�on.
Pour confire du gingernbre Mesue melange miel et sucre. Zingiber condi­ tum: „Prends du gingembre frais … 1 part, du miel 3 parts, du sucre 1 part. Fais cuire doucement“ .
Un commentateur du 16e s. Sylvius (alias Jacques Du Bois) precise qu’on le detaille en tablettes.
Des fleurs sont egalement con tes: roses, violettes notamment. Mel ro a­ tum ou violatum, uccharum ro atum ou violatu sont en tous points conformes
aux recettes arabes.
3. De peciebu.t loch
Parmi eux, loch de pino et loch de arnygdalis indiques contre Ia toux descen­ dent de CKAH T grecs. Ils se composent de fruits sec (amandes, pignons, avelins), de gommes (non seulement adragante mais aussi arabique), de miel et de sucre.
Loch anum et ezpertum est en revanche „ez inventione nostra“, de notre invention, proclame erement Mesue. Une orgie de drogues (cannelle, hysope, reglisse, jujube, capillaire, anis, fenouil, iris, calaminthe, etc.) est cuite dans 4 l. d’eau avec des raisins secs, des figues et des dattes. On fait reduire de moitie et ajoute 2 l. de penidium. Le tout est cuit jusqu’a consistance du miel. Puis on met de Ia gomme adragante, de Ia gomme arabique, de l’amidon, des amandes et pignons. O n melangc bien jusqu’a ce que Ia preparation soit
44
blanche. Un bonbon oscillant entre le nougat et le berlingot. La Nouvelle O cine de Dorvault (1955), Iivre de base des pharmaciens du 20e s., mentionne
encore ce loch; Ia recette est a peine differente de I’original.83
Le diamoron figure egalement parmi les Iochs. En melangeant du miel avec du jus de m res, on peut non seulement faire un mellite buvable; mais aussi obtenir une confection epaisse ressemblant a une pate. Cela depend du degre
de cuisson. D’o sa presence ici. 4. De yrupis
On y trouve auss1 bien les sirops que les robs prepares selon les techniques arabes. Ex.:
Rob de ribe . Du jus de groseilles est cuit jusqu’a reduction de moitie et clarifie par le repos. II est ensuite ltre, recuit et reduit jusqu’a consistance.
Syrupu.s de pomi . Du jus de pommes (10 1.) est cuit et reduit de moitie. On le clari e en l’abandonnant lui-meme pendant 2 jours. Ensuite il est ltre et on fait un sirop avec 3 Iivres de sucre.
V. LE BAS MOYEN AGE
Au bas Moyen Age Ia con serie n’accuse pas d’innovations importantes.
Les riches se gavent des friandises de Mesue et des auteurs arabes. Un repas digne de ce nom ne saurait se cloturer sans elles. On les appelle „boutehors“ , car servies pour mettre Ies gens dehors! Ils ne sont pas servis dans Ia salle manger, mais dans Ia chambre des parements (au salon, dirions-nous aujourd’hui). Vu leur usage epulaire grandissant Ies con series paraissent (timidement) dans Ies livres de cuisine du 14e s. Forme of Cury decrit ainsi des peere.s en confyt des poires con tes dans du sucre.84 Anonymo veneziano est plus prolixe.85 Cf. les recettes pour „chonfetare mandole fre che e per iche fre che e noce fre che“ , con re amande fraiches, peches fraiches et noix fraiches (qui sont soumises a une double cuisson dans du miel), pour „fare ranciata bona et delicata“, faire des oranges bonnes et delicates (les zestes sont con ts dans du miel, egale eut par 2 cuissons), pour faire „codogniato (pate de coing an miel et an sucre), pour faire confetti de mel e apiio e de pome paradisio“ (pate de pommes au miel), pour „chonfettare zuche“ , con re des gourdes ou calebasses (au miel et au sucre); une nouveaute qui fera Je tour de l’Europe de Ia Renaissance sous le
83 P. 898.
8� Ed. R. Warner, An!iqui!a!e• Culinariae, Londres, 1791, p.24. 85 Ed E. F ccioli, Arie della Cucina, T 1, Milan, 1966, p. 102 el s.
45
nom zuccata („succade“ en fran ais).86
Le Menagier de Paris en n donne a peu pres les lll�lllCS recett.es que le
Iivre venitien: „condoignac“ (päte de coing au miel), „confiture de noix“ (noix vertes con tes dans du miel), „orangeat“ (zestes d’orange con ts dans du micl),
„amagdala“ (amandes fraiches con tes dans du miel).87
En gagnant Ia table et Ia Iitterature culinaire, les con series ne restent plus
cantonnees dans le vocabulaire savant et entrent dans !es langucs vernaculaires. On les regroupe sous le nom generiquc de „con tures“ (qui garderont ce sens !argejusqu’au 19e s.) („com ts“ en anglais, „con ts“ en catalan, „confettt“ en italien). L’ancien fran ais !es divise en 4 fa illes:
1 . !eS „laituaires“ I ( . a d. !eS electuaria de p0ffiffiCS1 PfllßeS1 peches, de zesteS d’agru e; ce qu’on appelle en fran ais contemporain con tures,
2. !es „condoygnacs“ ou cotignacs, qui recouvrent a Ia fois Ia gelee et Ia päte de coing au miel ou au sucre (le diacidonium),
3. Ia farneuse „compost“88 melange de fruits et legu es con ts dans du miel, du vinaigre, de Ia moutarde; eile plonge ses racines dans l’antiquite el survit dans Ia mostarda di frutta a l’italienne.
4. en n les „epices de chambre“I qui regroupent a Ia fois:
– les fruits con ts, autrement dit les murabbayatjcondita,
– tous Ies bonbons au sucre nommes „dragees“ (aussi bien le penidium, Sorte de berlingot que I ‚ electuarium dulcium, genre de fondant ) epicees diverse­ ment, colorees (en rouge, c „anis vermeil“) ou Iaissees blanches (c „dragee blanche“ ) ,
– les pätes au miel comprenant toutes les confections aux fruits secs (de­ rivees aussi bien des t A L OTajLochs que des halwa), c. a d. nougats et massepains.89
VI. A LA VEILLE OE LA RENAISSANCE
A l’automne du Moyen Age, au moment oit Ia Renaissance frappe a Ia porte,
apparait en Espagne Je premier Iivre de Con serie a Ia fois indcpendant de Ia
86 J. Witteveen („Rose sugar and other medieval sweets“, PPC, 20, 1985, p. 26) ecrit in­ justement qu’il s’agit de pump tn c. ß d. courge; mnis elle vient d’Amerique (cf. J. Andre, Le nom du plante• dan1 Ia Rome antique, Paris, 1985, p. 80).
87 Ed. J. Pichon, Paris, 1846, pp. 247, 265, 269.
88 Sur ln „compost“ cf. C. A. Wilson, „The Sarncen Connection, P II“,PPC 8, 1981, p. 20. 89 D’apres A. Wilson („The Sarncen Connection, P 1“, PPC, 7, 1981, p. 18) mnssepnin vient de pnin et mnsse (synonyme d’alchim.ique) et signi ernit des lors „pnin nlchim.ique“ . Les Croises aurnient compnre lea mngni ques p tes d’amandes arabes dorees nu snfrnn ß des chefs d’oeuvres de Ia magie.
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rnedecine et de Ia cuisine: Libre de totes manie es de con ts (en catalan).90 De nouvelles cultures de sucre sont alors plantees dans Ia Peninsulc iberique et on assiste a une veritable debauche de con scries. Eu 1420 par exemple Ia Cour aragonaise en achete 240 kg aupres des apothicaires-epiciers de Valence.91
A Ia suitc du Libre se developpera toute une Iitterature con turierc. Mais au lieu de poursuivre sa voie vers I’independance, elle entrera dans Ies livres de secrets, ont Je genre se rattache a l’alchimie.92 C’est d’Italie que viendront les coups d’envoi avec:
– Opera nova di ricette et ecreti (s. I. n. d. vers 1500),
– Opera dignü ima … con multi bellüimi ecretide Maestro Giovanni (s. I. n. d. vers 1530),
– De ecreti d’Alexis Piemontese (ed. princ. Venise, 1555), qui traversem toute l’Europe Renaissante. Cf. editions fran aise a Anvers, 1557 et anglaise en 1558.
Citons pour terminer le plus ce!ebre con turier de cette epoque: celui de Nostradamus, medecin-astrologue-alchimiste; ecrit en 1552, il paraitra a Lyon en 1555.
90 Ed. L. Faraudo de Sninl Germnin, in Bolitin de Ia Real Academia de Buena� Lelra• de Barcelona, XIX, 1946, p. 97.
91 Cf. J. Guiral, „Le sucre Vnlence aux 16e et 16e s.“, Boire el Manger au Moven Age, T I, Paris, 1984, p. 120. Sur Ia corporalion des epiciera-npolhicairea voy. A. Lebigre, „Des apolhicnires aux pharmaciens“ , L ‚hi>toire, 100, 1 987, p. 99.
92 Parmi !es premiers livres de aecrels ratlaches l’alchimie, citons le Kitab al-anar (Livre du �ecrel•) et le Kitab �ir al-a•rar (Secret de� �ecret•) de Rhazes (9e s.) qui etail non seulement medecin mnia aussi alchimiste.
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MEDIUM AEVUM QUOTIDIANUM
newsletter 13
Krems 1988
Herausgeber: Medium Aevum Quotidiamun. Gesellschaft zur Erforschung der materiellen Kultur des Mittelalters. Körnermarkt 13, A-3500, Ösl(rreich. ·- Für den lnhult verant­ wortlich zeichnen die Autoren, ohne deren ausdrückliche Zustimmung jeglicher Nachdruck, auch in Auszügen, nicht gestaltet ist. – Herstellung: D ck & Kopie Wille • Tel. 587 97 12
Inhaltsverzeichnis/ Contents
Editor’s Preface 4
Terence Scully: Studies in Medieval Food 6
John D. Fudge: Supply and Distribution of Foodstuffs
in Northern Europe 1450-1500 ……………………………… 8
Mary Frances Zambreno: The Moral Ambiguity of the
Medieval Feast . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
Liliane Plouvier: La con serie europeenne au Moyen Age 28 Berichte – Besprechungen – Mitteilungen 48 Adressenverzeichnis der Autoren 59

Editor’s Preface
The present volume of Medium Aevum Quotidianum-Newsletter is an indirect result of the editor’s participation at the 23rd International Congress on Me­ dieval Stu ies at Kalamazoo this May. Among the numerous other papers delivered there, which have been relevant for historians of material culture and daily life of the Middle Ages, my attention was particularly drawn to a ses­ sion on medieval food organized by Terence Scully from the Department of French Language and Literature of Wilfrid Laurier University, Waterloo, On­ tario. Terence Scully is one of the few specialists on medieval food and cooking in North America and weil known for his editions of French cookery books and recipe collections (cf., e. g., „Du fait de cuisine par Maistre Chiquart 1420“, Val/e$ia40, 1985, 130-231; Chiquart1$ On Coo ery. A Fifteenth-Century Savo­ yard Culinary Treatüe. New York, Berne, Frankfurt/M., 1986; The Viandier of Taillevent, to be published this October by the University of Ottawa Press). For several years now, he has been organizing sessions on „Foods in the Euro­ pean Middle Ages“ at Kalamazoo.
When I offered Terence Scully and the speakers of his session – John D. Fudge, Mary Frauces Zambreno and Liliane Plouvier- to publish the papers in Medium Aevum Quotidianum-Newsletter, they all immediately accepted. By that, we get the opportunity to be quickly informed about some important new research. I would like to thank the authors, particularly for their readiness to send their manuscripts in such a short time after the conference, in spite of their many other obligations.
This Newsletter 13 will soon be followed by Newsletter 14, which is dedi­ cated to the conference „Mensch und Objekt im Mittelalter. Leben – Alllag – Kultur“, organized by Medium Aevum Quotidianum and the Institut für mit­ telalterliche Realienkunde Österreichs, taking place in Krems from September 27 to 30, 1988. As in the years 1984 and 1986, we would like to present sum­ maries of the papers delivered at the conference to inform our members about the main topics and aspects to be discussed.
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Two gucst editors will be responsible for Newsletter 15. Grethe Jacobsen and Jens Christian Johansen, both from Copenhagen, have agreed to edit thc volume, which will be dealing with the research on daily life and material culture of the Middle Ages in Den ark. It will be the rst of the already announced volumes concerning research in particular countries. We hope that this newsletter will be published at the end of 1988.
For 1989, we already have started the preparations for two volumes contin­ uing our select bibliographies. One volume will be devoted to medieval dress, the other to medieval ships. We also plan an updated version of the gen­
eral select bibliography, which was published as Medium Aevum Quotidianum­ Newsletter 7/8 in 1986. Numerous new books and articles have come out since then; a second edition seems to be necessary.
At last, I would like to thank those members of our society who have been – some of them continuously – contributing to Medium Aevum Quotidianum­ Newsletter. All others, I again would like to invite to send us articles, reviews, notes or announcements.
Gerhard Jaritz, editor
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